Focus : l’équitation handisport

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Ce qui fait la richesse du monde de l’équitation, c’est qu’il est infini. Il existe autant de façons différentes de monter à cheval que de cavaliers et de chevaux différents. Chaque jour, des milliers de cavaliers et de cavalières montent à cheval pour leur plaisir ou par profession. Toute relation entre entre un cavalier et son cheval est différente. Cette faculté qu’ont les chevaux de pouvoir s’adapter aux personnes avec qui ils évoluent leur donne un pouvoir unique de compassion et de compréhension. C’est pourquoi le cheval peut être vu comme un athlète, un ami, un compagnon mais aussi comme une aide entre une personne et ses difficultés.

Equestrian News met aujourd’hui en lumière l’équitation handisport et tous ces cavaliers qui se battent pour poursuivre leur passion malgré un handicap.

Qui de mieux pour nous parler d’équitation handisport qu’un cavalier qui la pratique ? Nous avons donc demandé à Salim Ejnaïni, cavalier de CSO amateur non-voyant, de nous accompagner lors de cet article.

Disclaimer : cet article est purement bienveillant et nous espérons avoir choisi les mots justes pour évoquer de la meilleure des manières l’admiration que nous avons pour tous les cavaliers handisport, et d’ailleurs tous les autres sportifs handisports qui nous étonnent chaque jour un peu plus par la force qui est la leur.

Grâce au cheval, de nombreuses personnes en situation de handicap peuvent, le temps d’une séance, « oublier » cette différence et se sentir capable, au même titre qu’une personne valide. L’équitation peut être pratiquée avec tous types de handicap : musculo-squelettique ou neurologique, par exemple.

Si vous cherchez des témoignages de personne pratiquant l’équitation handisport, vous remarquerez qu’ils évoquent tous le sentiment de liberté. Par exemple, pour ceux qui sont obligés d’utiliser un fauteuil roulant dans leur vie de tous les jours, les jambes du cheval deviennent les leurs. Ils ont alors le sentiment de pourvoir se libérer de ce handicap, le temps d’un instant, grâce au cheval. 

Avoir un handicap quel qu’il soit n’exclut pas pour autant la compétition, bien au contraire. Vouloir être Champion Olympique peut être le rêve de n’importe quel cavalier. Il reste ensuite à tout faire pour y parvenir.

La Classification

L’équitation handisport n’échappe pas à une règle de base : la classification. « La classification c’est le fait de rassembler des compétiteurs de sorte à ce qu’ils puissent se départager de façon équitable » Les cavaliers sont classés par « grades » en fonction de leur profil, ce qui leur permet d’avoir accès à des aides compensatoires (deux cravaches, des crieurs, une autre cheval en bord de piste…). Il existe 5 grades : Grade1A/1B, Grade 2, Grade 3 et Grade 4.

Le para-dressage

C’est la seule discipline à être présente aux Jeux Paralympiques depuis Atlanta en 1996. Cette épreuve se déroule en trois parties : Une épreuve individuelle en fonction des grades, une épreuve par équipes de 3 mélangeant les grades et enfin une épreuve de reprise libre en musique, pour les 8 meilleurs de la compétition individuelle. La France n’est pas à proprement parler la nation la plus performante en para-dressage mais tout est fait pour que cela s’améliore : « Aujourd’hui, la France se professionnalise dans sa démarche et c’est tout à son honneur. Elle donne de plus en plus de moyens et ils ont raison de le faire parce qu’il n’y a pas d’autre possibilité pour que cela marche que de considérer un sportif comme un sportif. Les cavaliers ont maintenant la possibilité de s’entourer correctement, de s’équiper correctement en matériel ou en chevaux et de travailler correctement. Les cavaliers ont la possibilité d’être véritablement au coeur d’un dispositif comme des cavaliers de haut niveau, comme des champions. En France, on est de très bon organisateurs mais pas forcément très bons convoyeurs de médailles, et aujourd’hui ils ont décidé de s’attaquer à cela et de donner aux cavaliers la possibilité d’être des cavaliers de haut niveau et cela à toute son importance ».

Le saviez-vous ?

Aux Jeux Paralympiques de Rio en 2016, l’équipe de France, composée de José Letartre, Thibault Stoclin, Céline Gerny et Louise Studer, s’est classée 10ème.

En individuel, Céline Gerny et Flint se sont classés 6ème de l’épreuve Ib et se sont donc qualifiés pour le freestyle, à l’issue de laquelle ils ont conservé leur 6ème place. José Letartre est lui aussi 6ème de sa catégorie accompagné de Swing Royal.

Pepo Puch est un cavalier autrichien ayant participé aux Jeux Olympiques d’Athènes de concours complet avec l’équipe australienne. Après un grave accident de cheval en 2008, il garde son rêve et ses objectifs en tête et se remet à cheval. Il réussit à décrocher une place pour les Jeux Paralympiques de para-dressage en 2016 à Rio et s’offre l’Or paralympique avec son cheval Fontainenoir.

Le para-CSO

Le dressage est la seule discipline olympique mais cela ne veut pas dire pour autant que les cavaliers handisports ne peuvent pas en pratiquer d’autres, bien au contraire. Comme Salim, de nombreux autre cavaliers pratiquent le CSO. « À l’époque les cavaliers non-voyant étaient guidés par un cheval guide devant eux. Lors du Jumping de Bordeaux qui était support de notre championnat de France par exemple on était très attendus il y avait un vrai engouement pour cette discipline, les gens adoraient ça. »

Malheureusement, au fil des années, cette discipline de « para-CSO » s’est essoufflée et a, petit à petit, disparu. Aujourd’hui, à part quelques compétitions amicales organisées dans certains concours, il n’existe plus de circuit à part entière.

Salim, lui, a pris un autre chemin, il n’est plus cavalier handisport. « Je ne voulais plus travailler avec un cheval guide mais je voulais monter et être guidé par un crieur. Cela a pris du temps, mais on a fini par y arriver ».

Aujourd’hui, il concourt en épreuve amateur « j’ai des aides qui sont permises par le règlement général des compétitions. L’article 12 permet à un cavalier en situation de handicap de participer avec les aides qui sont les siennes sous réserve que cela ne soit pas dangereux et que cela respecte l’équité technique. J’y tiens véritablement dans tout ce que je mets en place, je fais toujours en sorte de privilégier la sécurité et la performance. C’est pour moi deux choses qui, dans ce que l’on fait, ne peuvent pas être dissociées. La performance c’est la raison d’être de ce que l’on fait et la sécurité c’est le moyen de bien faire ».

L’équitation handisport c’est aussi accepter d’oublier tout ce que l’on sait et arrêter de penser que ce n’est pas possible, mais plutôt chercher comment on pourrait faire. Aujourd’hui, c’est presque anodin de voir arriver Salim et toute son équipe en concours alors que quelques années auparavant personne n’aurait imaginé qu’un cavalier non-voyant puisse enchaîner un parcours « seul ».

Une recherche de considération

Dans le handisport, ce qui revient souvent est le manque de considération et de reconnaissance qu’éprouvent les cavaliers : ils ne veulent pas être vus comme différents mais comme des cavaliers lambdas. « Ce que je trouve vraiment important, c’est que toutes les personnes avec qui je travaille et qui ont cru en moi ont vraiment vu l’aspect cavalier de ce que j’étais et non pas la dimension d’handicapé, de différent. Ils m’ont considéré vraiment en sportif, d’égal à égal et c’est plus que plaisant parce que c’est une forme de reconnaissance qui m’a longtemps manquée dans ma pratique ».

Les cavaliers handisports sont avant tout des hyper-passionnés. « On a toujours fait cela par passion. On est passionnés du beau sport et c’est ce qui nous fait tenir aujourd’hui. On se bat pour ce que l’on fait et ce qui n’a pas de prix c’est le retour des gens. Quand ils viennent me voir après mon tour, ils ont pris conscience que cela existait. Quand ils osent me dire « c’est bien ce que tu as fais dans la combinaison, mais alors du 5 au 6 c’était pas top », ça c’est le meilleur compliment qu’on puisse me faire. D’oser me juger, de me considérer en sportif avec ses réussites et ses échecs, les manques et les points de progression ».

Nous espérons que cet article vous aura permis de mieux comprendre les modalités de ces disciplines et de découvrir ces cavaliers plus que courageux. C’est une sorte d’hommage que l’on voudrait leur rendre aujourd’hui. Un grand merci à Salim Ejnaïni d’avoir pris le temps de discuter avec nous, ce fut captivant. 

Merci et Bravo.

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